Les mots que j’attendais

Ce week-end, j’ai dit au revoir à mes 27 ans, entourée de mes proches. C’était beau, rempli d’amour, et pourtant… j’avais toujours dans un coin de ma tête cette sensation étrange. Inconsciemment, j’attendais ton message. Rien de spécial, rien de grandiose… juste un simple « joyeux anniversaire Margaux ». Mais non.

Cela fait presque dix ans qu’on ne se parle plus comme père et fille. Dix ans que l’on ne va plus ensemble aux matchs de basket, que tu ne me demandes plus comment je vais. Si je venais à disparaître, le saurais-tu seulement ? Une petite inquiétude, une attention, quelque chose de normal pour un père… mais non.

À chaque anniversaire, et même à chaque fête des Rois, tu reviens malgré moi dans mes pensées. Ça fait plus de treize ans que nous ne partageons plus rien ensemble, mais ce jour-là, ton absence résonne plus fort que d’habitude.

Je t’ai tellement détesté. Et encore plus quand tes amis me demandaient de tes nouvelles, à moi, comme si j’étais censée savoir. Moi qui ignorais tout, alors qu’eux savaient que tu allais bien. C’est triste à dire, mais pendant longtemps, je me suis accrochée à l’idée que si tu ne voulais pas de moi, c’était peut-être parce que tu n’allais pas bien, que ta maladie t’avait éloigné. J’essayais d’y croire, et ça me faisait de la peine. Parce qu’au fond, la seule chose que je voulais, c’était que tu ailles bien.

Et puis un jour, je suis tombée par hasard sur un match de basket. Là, je t’ai vu. Tu allais bien. Trop bien, même. Tu riais, tu coachais des enfants, tu avais l’air heureux, vivant, épanoui. Et ce jour-là, j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps. Pas de tristesse, non. J’ai pleuré de soulagement. Parce que malgré tout, j’étais contente que la vie te sourie.

C’est ça, ma nature. Je suis comme ça : une fille gentille, sensible, anxieuse peut-être, mais qui veut toujours le bonheur des autres. Même si tu ne veux pas savoir de moi, même si tu n’es plus là comme père, je me surprends à imaginer mille scénarios dans ma tête… et si l’un d’eux finit bien pour toi, je suis heureuse. Parce que, quoi qu’il en soit, je veux que tu ailles bien.

Et moi, malgré tout, je vais bien. Grâce à la psy que toi, tu n’écoutais pas, j’ai appris à comprendre ta maladie et à ne pas me laisser détruire par elle. J’aurais pu en sortir brisée, pleine de rancune, incapable d’aimer. J’aurais pu détester les hommes, me fermer aux autres. Mais non. Même si parfois, à cause de toi, je me méfie, je continue à croire en eux, à croire en la bonté des gens. C’est ma façon à moi de transformer la douleur en force, et ton absence en leçon.

Chaque anniversaire, j’adore être entourée des miens, de ceux qui me donnent de l’amour et me rappellent que je compte. Mais peut-être que chaque anniversaire est aussi un double mouvement : une fête et un adieu, une joie et une nostalgie. Alors j’ai soufflé mes bougies en souriant, en riant même. Mais au fond, mon cœur pensait déjà à tout ce que j’ai vécu… à tout ce que j’ai perdu… et à tout ce que j’ai encore à construire.



Stromae- Papaoutai

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